En visite au Tchad, la candidate du Front National pour la prochaine élection présidentielle française s’est adressée aux députés. Un discours très attendu des observateurs quand on connait les positions radicales du Front National au sujet de l’immigration avec en toile de fonds sa politique d’expulsion des africains du territoire français. Au terme de son message, plus d’un a été interloqué par les déclarations de celle qui caracole en tête des sondages à quelques semaines du premier tour de cette élection, et pour cause.
Face aux députés Tchadiens, la française a voulu parler le langage de la vérité, de sa vérité. Ainsi elle a tenu d’abord à recadrer le débat en s’offusquant de l’image qui est faite d’elle par ses adversaires politiques. Pour Marine Lepen, la classe politique française a diabolisé le Front National en le peignant comme le parti de l’exclusion et du racisme. Que non clame-t-elle ! Le front National dira-t-elle en substance ne voit pas l’Afrique comme un ennemi, mais bel et bien comme un partenaire privilégié, du fait des liens historiques. Elle demande donc aux africains de ne pas imaginer qu’avec elle à la présidence de la République française, les africains seront pourchassés et expulsés. Elle précise que ceux qui sont sur le territoire de la France et en règle n’ont rien à craindre, par contre les candidats à l’immigration auront de sérieuses difficultés à s’installer dans son pays. En un mot comme en mille, elle va fermer les frontières. Et vlan. Dans le langage diplomatique, elle a cru faire passer la pilule, mais le résultat est le même.
La France est pauvre…l’Afrique est riche…
Marine Lepen a évoqué les raisons pour lesquelles elle ne peut cautionner l’immigration massive des africains. Elle parle de la politique hypocrite de la France depuis les vingt dernières années, qui prône la libre circulation des biens et des personnes, et l’accueil des immigrés. Selon la candidate, il faudra davantage renforcer l’aide au développement afin de favoriser le développement véritable de l’Afrique, en incitant les jeunes à trouver des emplois localement, évitant ainsi l’immigration massive. A cette rhétorique elle a planté un clou dans le sabot en martelant qu’en France tout n’est pas rose, le pays s’appauvrit, il est endetté et ne peut par conséquent plus contenir tous les immigrés. En face elle a peint un tableau du continent noir plein de ressources naturelles et de potentialités à développer par les dirigeants.
Dans l’hypothèse où les français lui accordent leur confiance au soir du second tour, Marine Lepen envisage des relations France-Afrique plus serrées sur les problèmes de sécurité face au terrorisme, (elle a d’ailleurs apprécié les interventions française dans la zone, avec l’opération Barcane), et sur le plan économique elle augmenterait de manière significative les fonds alloués au financement du développement du continent. Elle n’a eu de cesse de présenter l’Afrique comme un partenaire avec qui elle traitera d’égal à égal, tout en s’assurant que chacun tient bien ses concitoyens dans son sol, sur son territoire.
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La real politique ?
Marine Lepen veut prendre date avec l’histoire et a qualifié son discours de »discours de Ndjamena », comme l’on parlait du « discours de Brazzaville » avec le Général De Gaulle. Le débat sur la politique africaine de la France n’a pas encore été abordé par les candidats lors de leurs joutes oratoires. La candidate du front National a voulu briser un tabou en se rendant sur le continent et en s’adressant aux élus Tchadiens, mais en direction de tous les élus de l’Afrique francophone. Elle avait beaucoup de mal à prononcer ses phrases, avec un ton saccadé, loin du ton péremptoire qu’elle utilise depuis le début de cette campagne. Elle sait que le débat sur la politique Africaine est l’un de ses tendons d’Achille, et qu’elle aura du mal, beaucoup de mal à convaincre son électorat de la suivre dans cette nouvelle vision du monde, où elle parlera d’égal à égal avec des chefs d’états africains. Décidément la course au pouvoir pousse les candidats à dire des choses et leur contraire pour s’attirer les voix indécises. Mais nul n’est dupe, ce n’est pas en mettant beaucoup d’eau, ou alors trop d’eau dans son vin qu’on le rendra buvable…
Pierre Pochangou