Le rendez-vous de ce lundi matin pour la rentrée scolaire du second trimestre était particulièrement attendu par les observateurs de la scène camerounaise. En raison de la grève des enseignants des régions anglophones du nord-ouest et du sud-ouest, les ministres sectoriels de l’éducation de base et des enseignements secondaires ont passé le week-end à sensibiliser les enseignants à travers des réunions avec les syndicats frondeurs. Tout ce ramdam de dernière minute ne va pas faire plier l’échine aux grévistes qui sont déterminés à maintenir la pression par une illimitation de leur mouvement.
Les images de Bamenda et Buéa en cette matinée de lundi 9 janvier 2017 sont celles de «villes mortes». Pas un chat dans les rues diraient les cinéastes, pas de taxi en circulation, et surtout des établissements scolaires vides, sans élèves ni enseignants. Les quelques rares enseignants rencontrés dans leurs établissements sont visiblement apeurés par leur acte, car les mots d’ordre de violence faite aux « casseurs de grève » avaient circulé tout le long du week-end. Un enseignant sous l’anonymat explique : « J’ai pris le risque de me déplacer ce matin pour venir, à pieds car il n’y avait ni moto taxi, ni taxi classiques. Je suis venu car les informations circulaient selon lesquelles les autorités dont le ministre garantissait la protection de ceux qui allaient reprendre le chemin des classes, et vous le voyez avec cette forte présence de policiers et forces de l’ordre. Mais en vérité les gens ont peur des représailles, car les grévistes vivent avec nous dans les quartiers et ils peuvent ç tout moment agir. Je crois que c’est pour ça que ce mouvement a été fort ».
Villes mortes ?
La situation qui prévaut est de plus en plus inquiétante car parti d’une série de revendication des avocats puis des enseignants, ce mouvement touche désormais les autres secteurs d’activité. Les commerçants dans les marchés ont laissé leurs boutiques, les vendeurs à la sauvette sont restés chez eux, tandis que les transporteurs se retrouvent en petits groupes dans les stations-services pour observer les mouvements. Toutes les deux régions du nord-ouest et du sud-ouest sont donc désormais dans les « villes mortes », un mode de revendication difficile à débloquer dans la mesure où chacun reste chez soi et il est difficile de faire sortir les populations par la force.
Le gouvernement multiplie les consultations, et certains analystes qui prédisaient un durcissement des positions suite au discours du chef de l’état le Président Paul Biya le 31 décembre dernier semblent avoir vu juste. Les prochains jours nous en diront plus.
Pierre Pochangou