Il n’y aura ni baisse, ni coupe de salaire, ni dévaluation de la monnaie encore moins une politique d’austérité socialement insupportable au Cameroun après le récent accord que le pays a signé avec le Fonds Monétaire International(FMI). On va plutôt assister à une « véritable réduction du train de vie de l’Etat » avec entre autres, l’annulation des missions inutiles, la réduction de l’enveloppe dédiée au carburant et à l’achat des véhicules, etc. En somme, il est prévu déjà tel qu’annoncé, une ponction de près de 100 milliards de FCFA dans le budget des différents départements ministériels à gagner dans le cadre de ce programme que le gouvernement s’arrange à implémenter. Le 26 juin dernier, le conseil d’administration du FMI a accordé un prêt de 666,2 millions de dollars au Cameroun. Ce prêt est assorti d’un programme d’ajustement de trois ans. Très vite, la rumeur, sur des mesures drastiques dans les prochains jours et une probable dévaluation de la monnaie, a pris le devant et allait grandissant dans le pays. Une grande peur et des inquiétudes ont envahi de nombreux camerounais au regard surtout de ce qu’ils ont dans la mémoire comme souvenir du programme d’ajustements structurels des années 90 sous la coupe du FMI.
Pourtant il en est rien cette fois-ci, car il ne s’agit véritablement pas d’un ajustement structurel au sens noble du terme et tel que connu, du moins, si l’on s’en tient aux déclarations et surtout à l’exercice qu’ont mené lundi 24 juillet 2017, le ministre camerounais de la communication et des hauts cadres, experts du ministère de l’économie et celui des finances. L’objectif était tout simple : rassurer les camerounais qu’elles n’ont pas de raison d’avoir peur ou d’être inquiète quant à l’avenir. Le retour du Cameroun au FMI est un choix mesuré, incontournable et utile pour assoir et redonner un souffle à l’économie et relancer le développement face au contexte morose dans la sous-région, ont tenté d’expliquer à leur manière, tous ces experts.
Aboubakar Sidick M.
Voici l’intégralité de la Déclaration de cette conférence de presse gouvernementale du Ministre de la Communication, Porte parole du gouvernement du Cameroun.
Mesdames, Messieurs les Journalistes,
Je vous ai conviés à la rencontre de ce jour, pour vous communiquer des informations pertinentes sur le programme économique et financier que notre pays vient de mettre sur pied et qui, vous le savez déjà, a obtenu le soutien du Fonds Monétaire International – le FMI – à travers un concours financier connu sous le nom de Facilité Elargie de Crédit en abrégé FEC.
Je vous souhaite une chaleureuse bienvenue à cette occasion.
Mon propos va s’articuler en trois points, afin de répondre le plus utilement possible aux préoccupations que vous avez exprimées dans vos différents traitements de ce dossier et aussi pour la bonne information de l’opinion publique :
D’abord le contexte, la justification et les objectifs poursuivis par le Programme ; ensuite la consistance du Programme lui-même ; enfin, le rôle du FMI et la nature de la Facilité Elargie de Crédit soutenant le Programme.
S’agissant du premier point, je dirais en rappel que, c’est à l’initiative du Président de la République du Cameroun, Son Excellence Paul BIYA, que les Chefs d’Etats de la CEMAC se sont réunis le 23 décembre 2016 dans le cadre d’un sommet extraordinaire élargi à la Directrice Générale du FMI et au Ministre français de l’Économie et des Finances, pour plancher sur la conjoncture économique et monétaire dans la sous-région.
Au terme de leurs travaux, les Chefs d’États ont adopté 21 résolutions, dont la résolution n°13, invitant les pays de la CEMAC à engager sans délai des négociations avec le FMI, pour mieux structurer leurs efforts de redressement économique, eu égard au choc subi du fait de la baisse drastique des cours du pétrole sur le marché mondial.
En effet, la situation économique des Etats membres de la CEMAC s’était sensiblement détériorée depuis 2014, faisant passer le taux de croissance moyen de la sous-région de 2,1% en 2015 à moins 0,7% en 2016, avec une dette publique représentant en 2015, 34,9% du Produit Intérieur Brut, pour se situer à 44,6% en 2016.
Quant aux réserves, elles passaient de 4 400 milliards de francs CFA en 2015, à 1 900 milliards de francs CFA, soit en termes de mois d’importations, de six à deux mois environ en 2016.
En ce qui concerne le solde extérieur courant, il était resté négatif jusqu’en 2016, se situant à hauteur de moins 10,2%.
Il s’agissait donc pour les Chefs d’Etats, d’amorcer une sortie de crise et de mettre en place les conditions d’une relance vertueuse et durable de leurs économies respectives, avec le concours du FMI, en engageant des efforts dans le double sens national, puis sous régional.
Dans cette optique, le leadership du Chef de l’Etat camerounais aura contribué à diriger une réponse régionale coordonnée, pour maintenir l’intégrité de l’arrangement monétaire de la CEMAC, et éviter de plonger les économies de la Communauté dans un marasme dont les conséquences économiques et financières auraient été sans précédent.
Au sein de la zone CEMAC, l’économie camerounaise s’est caractérisée par une résilience particulière, en raison de sa plus grande diversification, de la solidité de son tissu industriel et du dynamisme de sa demande intérieure.
Mais, inséré dans une logique communautaire et intégrée, le Cameroun a ensuite commencé à recevoir l’impact négatif des économies moins résilientes dans la sous-région et des chocs subséquents liés aux impératifs de sécurité intérieure.
Les conséquences ne se sont pas fait attendre en termes macroéconomiques, entrainant une forte baisse des réserves internationales de la zone CEMAC prises dans leur globalité, puis en fin de compte, de celles plus spécifiques au Cameroun.
C’est pour enrayer cette spirale baissière et en tout cas dépréciative, que notre pays a élaboré un programme économique et financier triennal, visant à rétablir la stabilité et la viabilité extérieure de l’économie, tout en améliorant sa compétitivité, en renforçant la résilience du secteur financier et en favorisant une croissance vigoureuse et durable.
Le même programme était également destiné à servir de catalyseur pour la mobilisation de l’aide de nos partenaires techniques et financiers dans le cadre des projets ciblés d’appui budgétaire.
Pour appuyer ce programme dont – je tiens à le préciser – l’initiative est endogène et non imposée de l’extérieur, le Gouvernement a signé le 26 juin 2017, un Accord avec le FMI, dont le financement s’inscrit dans le cadre d’un mécanisme dénommé « Facilité Élargie de Crédit ».
Ledit Accord porte sur un montant de 483 millions de Droits de Tirage Spéciaux, soit environ 666,2 millions de dollars, équivalant à environ 400 milliards de francs CFA, dont 102 milliards de francs CFA disponibles dès l’approbation du Conseil d’Administration du FMI.
Il est important de noter que l’Accord dont il est question permet au Cameroun de tirer jusqu’à 175% du montant de ses réserves qui, aujourd’hui, s’élèvent à 275 millions de Droits de Tirage Spéciaux.
Il faudrait aussi mentionner que d’une manière générale, la Facilité Elargie de Crédit constitue le principal outil dont le FMI dispose pour apporter un soutien à moyen terme aux pays qui font face à des déséquilibres macroéconomiques.
Les soutiens accordés couvrent quant eux une durée maximale de trois ans.
Mesdames, Messieurs les Journalistes,
Comme je l’indiquais plus haut, l’Accord passé avec le FMI pour cette Facilité Elargie de Crédit ouvre la voie à des financements bilatéraux additionnels.
À ce titre, 887 milliards de francs CFA sont attendus en plus du financement du FMI, en provenance de partenaires techniques et financiers, selon la répartition suivante :
pour la Banque Africaine de Développement : 377 milliards de FCFA ;
la Banque Mondiale : 247 milliards de FCFA ;
la France à travers l’Agence Française de Développement : 197 milliards de FCFA ;
l’Union Européenne : 66 milliards de FCFA.
Au titre de la seule année 2017, 510 milliards de de FCFA seront mis à la disposition du Cameroun dans le cadre des réformes-clé dans certains secteurs jugés critiques pour notre économie.
Le taux d’intérêt pour le remboursement de ces financements est de 0%, avec un différé d’amortissement de cinq ans et demi et une échéance maximale de dix ans.
Il est important d’indiquer ici que le programme triennal ainsi appuyé par la FEC et les financements additionnels y adossés, est fondé sur notre propre stratégie de la croissance telle que fixée par le DSCE.
Il vise en outre à préserver les objectifs sociaux fixés par le Gouvernement.
Autrement dit, aucune interférence extérieure n’accompagne la signature d’un Accord tel que celui qui vient d’être signé entre le Cameroun et le FMI.
Il ne s’agit donc pas, contrairement à ce qu’on a entendu dire ces derniers temps, d’un Programme d’Ajustement Structurel, mais plutôt d’un soutien des partenaires techniques et financiers à la mise en œuvre de la vision gouvernementale en matière de développement économique et social de la nation.
Bien mieux encore, cet engagement de notre pays va renforcer la compétitivité et le potentiel de croissance à moyen terme du Cameroun et conforter davantage la stratégie nationale visant à atteindre le statut d’économie émergente à l’horizon 2035.
Tel est en tout cas l’engagement du Chef de l’État face à la nation tout entière.
Telle est l’aspiration légitime du Peuple camerounais.
Voilà donc, Mesdames, Messieurs les Journalistes, les éclairages et les précisions que le Gouvernement entendait vous apporter par ma voix, pour une meilleure appropriation de cet Accord que le Cameroun vient de signer avec la communauté financière internationale et pour une saine information de l’opinion publique.
Je vous exhorte à en faire un usage professionnel, objectif et responsable.
Je vous remercie de votre aimable attention.
Issa Tchiroma Bakary