L’organisme du système des Nations-Unies et l’organe régulateur des médias au Cameroun ont magnifié cet intérêt à Yaoundé, il y’a plusieurs semaines, alors que la convocation du corps électoral pour l’élection présidentielle était encore attendue. C’était à travers un atelier d’échanges avec les responsables des médias et des rédacteurs en chef de certains organes implantés dans la cité capitale du Cameroun. Cette rencontre avait pour objectif d’assurer une meilleure promotion du genre à travers les médias pendant les échéances électorales dans le pays.
Pendant toute une journée, les différents participants ont eu à échanger sur la situation des femmes au Cameroun, les réalités dans les médias quant à la place de celles-ci dans les différentes productions, leurs places même au sein de ces médias. Le taux de représentativité et de participation de la gente féminine reste toujours faible. Si aux derniers élections sénatoriales, l’on a noté un frémissement, 30% souhaités, les résultats restent en deçà de l’objectif de parité 50-50 voulu d’ici 2030 relève le CNC, le Conseil National du Cameroun. Autre illustration poignante, au moment où nous mettons sur presse cette information, à 24 h de la clôture du dépôt de candidature à Elections Cameroon pour la présidentielle 2018, aucune candidature féminine n'est encore reçue sur 9 dossiers déjà. Bien plus, dans les médias et la confection des sujets, les femmes ne sont pas toujours sollicitées ou sont très faiblement sollicitées, révèlent de nombreuses études faites dans ce sens. Un monitoring de la télévision nationale du Cameroun(CRTV) fait par le Conseil National de la Communication pendant 9 semaines du 1er août au 30 septembre 2017, a amené cet organe par exemple à conclure que « malgré la parité des genres au sein de la population camerounaise(femme :50,53% et homme :49,47%), les intervenants présents à la télévision nationale sont moins souvent des femmes que des hommes. » Cette tendance est vraie quel que soit le genre de programmes de la Crtv télé et l’importance du personnage dans les programmes conclut ce rapport de monitoring qui illustre en fait, la face visible de l’iceberg car la situation n’est pas différente dans les autres médias du Cameroun.
Donner la parole aux femmes, l'un des défis des médias
Une gestion selon l’approche genre des différentes échéances électorales au Cameroun dans les médias au Cameroun est une autre occasion de faire avancer les efforts en vue de la participation politique et l’autonomisation des femmes d’après le Conseil National de la Communication et l’ONU Femmes. Dans le domaine politique par exemple, il est question de donner la parole aux femmes dans les médias, qu'elles soient candidates ou non, représentantes des candidats ou partis politiques ou tout simplement des personnes ressources capables d'éclairer l'opinion sur un sujet. Pour Adama Moussa, le représentant résident de ONU Femmes au Cameroun, cette rencontre avec les responsables des médias rentre dans une stratégie de promotion de l’implication des femmes en politique et de travail en partenariat avec les médias de par le rôle qu’ils sont appelés à jouer pour la cause des femmes. ONU Femmes est convaincue comme tous les autres acteurs sociaux que les médias ont beaucoup d'influence sur la façon dont l’on perçoit et comprend le monde qui nous entoure. Pour la Directrice exécutive d'ONU-Femmes, Phumzile Mlambo-Ngcuka, cette influence a plusieurs dimensions. « Même lorsque l'information est tout à fait exacte, d'un point de vue factuel, si elle est exprimée principalement par des hommes, à propos des hommes, cela déforme effectivement la réalité. Chez ONU-Femmes, nous pensons que nous devons œuvrer en partenariat pour modifier le paysage des médias et les mettre au service de l'égalité des sexes." déclarait-elle déjà en mars 2016 au cours d'une rencontre organisée en marge de la 60ème session de la Commission de la condition de la femme au siège des Nations Unies. ONU-Femmes présentait un partenariat conclu avec plus de 30 organes d'information à travers les différents continents, dans le but de susciter des actions concrètes destinées à promouvoir l'égalité des sexes. Ce partenariat intitulé « Franchissons le pas pour l'égalité des sexes » réunit des médias du monde entier, dans les secteurs de la presse écrite, de la radio, de la télévision et de l'Internet, et a pour objectif d'atteindre un large public. Les différents signataires se sont engagés à mettre davantage l'accent sur les droits des femmes et l'égalité des sexes dans leur couverture de l'actualité. Plus de 35 organes d'information de premier plan ont signé ce partenariat en tant que membres fondateurs.
L’élection présidentielle au Cameroun dont la date est connue, le 7 octobre 2018 et qui se prépare à tous les niveaux, arrive donc comme pour mettre très rapidement en mouvement les journalistes et autres responsables des médias camerounais, rentrés dans leur rédaction avec un code de bonnes pratiques pour la couverture des élections sensibles au genre, élaborés consensuellement au cours de cette rencontre dans les locaux de ONU femmes à Yaoundé. Cet atelier a été animé par des experts à la fois de cet organisme, du CNC et de l’univers médiatique.
Les femmes doivent prendre une part active dans les débats publics au cours des élections au Cameroun. Les médias doivent les encourager en leur ouvrant leurs antennes et s’en appuyant aussi plus sur les ressources féminines qui sont également d’une qualité exceptionnelle, avait alors indiqué le président du CNC, Peter Essoka. Le CNC a d’ailleurs mis au point un baromètre de la diversité au Cameroun, un outil indispensable d’analyse qualitative et quantitative de la présence du genre dans les contenus médiatiques dans le pays, lequel outil est appelé aussi à servir de base pour la reconnaissance et récompense des bonnes pratiques.
Œuvrer pour la paix au Cameroun
L’Onu femmes et le CNC ne se sont pas arrêtés là. Après cet atelier dans la capitale du Cameroun, le cap a été mis dans d’autres régions du pays, cette fois-ci avec d’autres acteurs dont l’UNESCO, le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (UNOCA), le Centre des Nations Unies pour les droits de l’homme et la démocratie en Afrique centrale (CNUDHD-AC), le PNUD pour le renforcement des capacités des journalistes en matière de couverture médiatique des élections et de promotion des scrutins pacifiques au Cameroun. De Ngaoundéré, du 26 au 28 juin 2018 qui a vu la participation de trente professionnels des médias venus des régions de l’Adamaoua, de l’Est, de l’Extrême-Nord et du Nord, à Bafoussam du 10 au 12 juillet avec les journalistes de l’Ouest, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en passant par Douala, du 3 au 5 juillet 2018 avec les journalistes exerçant dans les régions du Littoral, du Centre et du Sud, il a été question d’échanger avec tous ces professionnels sur les questions liées à l’éthique et à la déontologie journalistique, les enjeux de la régulation et de l’autorégulation, le traitement de l’information électorale, les principes de communication non sexistes dans le processus électoral, la pratique des réseaux sociaux, etc, et surtout d’adopter un code de bonne conduite des journalistes et des médias en période électorale au Cameroun. Le dernier atelier est annoncé du 26 au 28 juillet à Mbalmayo à l’intention des animateurs et responsables des radios communautaires.
Aboubakar Sidick MOUNCHILI